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Affichage des articles du novembre, 2025

L'Inertie Turquoise

  Je porte en moi ce vide pâle et dur, cette couleur qui n'appartient qu'aux lames. Turquoise comme un ciel d'hiver trop pur, comme l'acier qui nie les flammes. Mon corps avance, mais ma volonté dort. Les gestes tombent sans raison ni force. Je connais la saveur métallique du sort : Celle du fer qui traverse l'écorce. Rie ne me pousse, rien ne me retient. Je suis l'acteur d'un théâtre sans pièce. Le temps s'écoule, étranger et lointain, Pendant que mon âme s'endurcit et se glace. J'ai goûté cette immobilité froide, ce spleen aux reflets de cuivre et d'azur. Mon existence : une parenthèse vide, un silence taillé dans le métal obscur. Didier Guy

L'Arrêt des Aiguilles

  Le cadran s'est figé dans sa course muette, les heures ont déserté leur poste familier. Un silence doré investit la retraite où chaque grain suspend son vol poussiéreux. L'air devient matière, presque palpable, chargé de ce qui fut et ne reviendra plus. Dans cette trêve close, immobile et fable, je respire un instant qui jamais ne conclut. Lumière ambrée filtre par la croisée, caresse les surfaces oubliées du monde. Comme un soupir ancien dans l'âme déposée, cette pause m'enlace, profonde et féconde. Le temps a pris congé de sa marche certaine, me laissant seul gardien d'un royaume éteint, où la poussière danse en spirale sereine dans ce refuge d'or où plus rien ne s'atteint. Didier Guy

Sous les Ombres d'un Monde Ancien

  Les ténèbres ont un poids, une densité d'encre, comme si la nuit elle-même avait bu le fer forgé. Dans cette fuite de lumière où tout s'ancre, le passé devient cendre, un secret monnayé. Les photographies jaunies gardent leur fantômes, prisonniers du sépia, couleur de l'oubli. Chaque visage figé porte un faux axiome : Que l'absence de jour rendrait tout accompli. Je cherche dans ces ombres volontaires la trace d'un homme qui fuyait l'éclat, préférant aux clartés les chemins solitaires, où seul le goût du sang-froid le guidait là-bas. Le silence a des dents, une morsure glacée, qui ronge les certitudes et les vieux mensonges. Dans cette obscurité choisie, jamais forcée, se cachent les vérités que personne ne songe. Didier Guy

La foule invisible

  Dans la lumière bleue des écrans, je compte les visages sans regard. Mille noms défilent, indifférents, comme des ombres dans un couloir tard. Leurs vies brillent en carrés parfaits, sourires figé, bonheurs de surface. Je glisse mon doigt, cœur abstrait, sur ces existences que rien n'embrasse. La nuit avale mes notifications, chiffres rouges qui percent le vide. Je parle à des spectres, sans réponse, sans nom, dans ce temple où la solitude réside. Ils sont là, partout, nulle part à la fois, présences creuses dans ma paume glacée. Je cherche une voix parmi mille voix, mais seul le silence me tient enlacé. Didier Guy

Le poids du jaune

  Le monde penche depuis que tu es partie, un axe brisé que nul compas ne retient. Le jaune n'est plus lumière, il est métal, âcre sur la langue, brûlant dans la gorge. Je marche dans des rues que je ne reconnais plus, où chaque angle semble faussé d'un degré, où les ombres tombent à contresens du soleil, comme si la gravité elle-même doutait. Tu as emporté l'aplomb des choses simples : Le café du matin, l'équilibre des heures, ce fil invisible qui maintenait debout les jours ordinaires et leurs gestes tranquilles. Maintenant tout vacille. Le jaune envahit, couleur de l'absence, teinte du vertige, goût ferreux qui persiste au fond du palais, trace indélébile de ton départ brutal. Je cherche un point fixe dans ce monde oblique, mais tu étais ce centre, cet axe perdu. reste ce basculement, cette inclinaison sourde, et le jaune métallique qui ne s'efface pas. Didier Guy

Les Yeux de la Tour

  Les lumières, clouées au flanc de la pierre, observent sans cligner, sans un frémissement. Là-bas, les toits boivent la dernière lumière, et le jour s'accroche en un dernier serment. Ici, le luxe s'efface, la suie le remplace, un vent lourd de fatigue traîne dans les couloirs. Le silence n'est pas paix, c'est l'hiver qui s'avance, un froid qui ronge l'ombre et glace les espoirs. Une vapeur s'échappe, souffle d'un monde las, où le béton étouffe et où la peine veille. On dirait qu'un géant, sous ses pas, nous écrase, et que la nuit n'est plus qu'une lente oreille. Didier Guy

L'asphalte saigne en silence

  Le béton a bu mes silences, chaque fissure porte un prénom. Je graffe mes plaies sur les façades, pendant que la ville fait semblant. Mes cicatrices ont un goût de cuivre, elles traînent leurs ombres au sol. Je les couche sur les murs qui vibrent, mes confessions sans protocole. La rue avale mes complaintes, les transforme en graffiti rouillé. Personne ne voit l'encre contrainte qui coule de mes doigts serrés. Je scande mes fractures dans l'ombre, un refrain que personne n'entend. Mes mots cognent contre le bitume sombre, cherchant un cœur ou simplement du temps. Didier Guy

L'Orange du Hasard

  Le ciel s'est trompé de couleur ce matin, un fruit acide a roulé dans l'infini. Dieu, distrait, a cliqué sur mon destin, et l'univers s'est mis à rire, sans fin. L'erreur est douce, elle a goût de zeste, un éclat vif dans le noir des questions. Le chaos porte un gilet de fête, et moi, je danse avec mes illusions. Personne ne sait d'où vient cette lueur, ce clin d’œil orange, ce rire en l'air. Peut-être un signe, ou juste une erreur, un bug joyeux dans le grand programme amer. Didier Guy

L'Appel du Bitume

  Mes pas sont lourds de tous les kilomètres avalés     À ce carrefour où chaque route se défait Les feux rouges ne sont que des conseils timides Moi, j'ai dans la poitrine un soleil qui décide La cendre dans la bouche, résidu des adieux Mais sous le capot gronde un chant furieux Qui défie les couleurs imposées du chemin Et transforme l'asphalte en domaine divin La patience n'est pas l'outil du conquérant Quand l'horizon vous harcèle d'un désir brûlant Je choisis la vertige, la course sans remord où chaque virage serré devient un accord Le sommet n'attend pas ceux qui comptent les heures Il se donne à celui dont la vitesse est sœur Dans ce monde mouvant où les destins se font Je suis celui qui crée sa propre loi du pont Didier Guy

L'Autre Rive

  Derrière l'écran, un monde se déploie, où chaque geste est lumière, chaque pas un choix. Les murs s'effacent, la nuit se déploie, et l'on marche, sans corps, sous un ciel si froid. Les doigts frôlent l'invisible, tracent des destins, des villes naissent, des forêts, des jardins. Le temps s’étire, se plie, se fait complice, de nos silences, de nos cri, de nos délires complices. Plus de limites, plus de peaux, plus de lois, seulement l'éclair d'un rêve qui s'effiloque. On y guérit ses peurs, on y tisse des voix, on y oublie le poids d'une vie qui s'étouffe. Mais quand le casque tombe, que reste-t-il ? Un souffle court, un cœur qui bat trop vite, l'ombre d'un rire, l'écho d'un exil, et ce goût de cendre après l'infini. Là-bas, les autres sont ombres ou reflets, des visages lissés par des algorithmes parfaits. On s'y aime sans chair, on s'y parle sans regrets, jusqu'à confondre l'aube avec la nuit des projets. Dem...

Atlas du sang et de l'absence

  Cette rue garde l'empreinte de tes pas, mon cœur est une cartographie sanguine et chaude. Chaque angle de bitume porte ton poids, chaque intersection demeure, lourde. Les veines tracent des méridiens secrets, longitude de l'attente, latitude du silence. Je marche dans ces lignes que tu as faites, cherchant la légende de ta présence. Les pavés ont mémorisé ta cadence, le vent transporte encore ton parfum salé. Mon sang dessine des frontières immenses, entre ce qui fut et ce qui reste brûlé. Je suis géographe de l'invisible, cartographe des instants disparus. Cette ville devient un pays illisible, où chaque rue mène vers le non-revenu. Mes artères sont des chemins sans retour, mes battements, des coordonnées perdues. Tu as traversé mon paysage intérieur, laissant des cicatrices comme des rues. Didier Guy

Quand le froid devient cri

  Le matin se fige en cristaux tranchants, une rage glacée mord la fenêtre. Bleu violent, le froid devient vivant, il hurle sans voix, silence traître. J'observe ce combat figé dans le verre, nature et demeure face à face. Le givre dessine ses lois austères, chaque motif, une menace qui passe. L'hiver n'offre aucun pardon ce jour, il impose sa loi de gel brutal. Je reste là, spectateur sans détour, devant cette beauté féroce et fatale. Le chant s'est tu sous cette emprise, avalé par la morsure des heures. Seul demeure le bleu qui merise, cette colère froide qui demeure. Didier Guy

Le poids des chaînes dorées

  Le fil invisible tissé dans l'ombre, un pacte tacite entre le maître et l'or. L'argent n'est plus qu'un mirage qui encombre, et l'esclave salarié paie son propre sort. Je vends mes heures contre une promesse vide, chaque matin, le même masque à enfiler. Les murs du bureau deviennent ma pyramide, où je bâtis la fortune d'un autre condamné. Le contrat parle de liberté, quelle ironie, quand chaque clause resserre un peu plus l'étau. Je négocie ma vie contre des garanties, pendant que d'autres comptent mes numéros. Ils appellent cela dignité, épanouissement, mais je reconnais les barreaux sous le vernis. L'or coule vers le haut silencieusement, et moi, je reste là, attendant mon prix. Parfois je rêve de briser cette alliance, de reprendre ce temps vendu au plus offrant. Mais la peur me cloue dans cette soumission immense, car l'esclave moderne craint plus que l'océan devant. Didier Guy

Ce Que la Terre Murmure

  Sous les cimes où le jour se pose, un chant monte, pur et profond. Ce n'est ni plainte ni reproche, mais l'écho d'un monde sans fond. Les doigts des anciens ont sculpté dans l'os léger des mélodies qui traversent l'été, portées par des vies jadis. La nuit écoute, immobile, ces voix qui percent l'infini. Elles parlent d'une terre fertile, d'un feu jamais endormi. Prends cette flûte aux doigts tremblants, lève-toi vers l'horizon clair : Tu n'es qu'un maillon vibrant dans ce grand cercle de l'air. Demain, peut-être, d'autres lèves ces notes claires comme un serment, car la terre, quand elle rêve, ne connaît pas d'évanouissement. Didier Guy

Illusions du Marché

  Dans les vitrines, des promesses scintillent, des rêves en carton, façonnés pour plaire. L'éclat du rouge, comme un cri qui s'agite, masque les douleurs que le cœur ne sait taire. Achète ta joie, mais à quel prix, dis-moi ? Les sourires vendus, goûts amers de l'absence, une lueur trompeuse, un reflet de choix, des ombres dansent, mènent à la décadence. Les rêves sont des pièces, échangées pour rien, les mots sont des chaînes, ligotant notre être. L'illusion d'un monde, un festin sans lendemain, le désir se fane, mais l'appétit s'apprête. Didier Guy

Quand l'enfance régnait sur le monde

  Les pieds nus courraient sur l'herbe mouillée, chaque flaque était un océan à conquérir. Nos châteaux tenaient dans des branches nouées, et l'aventure n'attendait qu'un soupir. Le temps s'étirait comme un élastique d'or, les heures n'avaient pas de nom, pas de poids. On rentrait tard, les joues rouges encore, les poches pleines de cailloux et de joie. Pas de miroir pour juger nos visages, seulement le rire franc d'un camarade. La liberté n'avait pas besoin d'âge, elle vivait dans chaque cavalcade. Aujourd'hui le silence a pris leur place, ces jeux d'enfants qu'on ne reverra plus. Mais dans mon cœur, leur lumière tenace brûle encore, même quand tout est perdu. Didier Guy

Les Ruines d'un Rêve Collectif

  Une doctrine promise aux ventres affamés, bâtie sur les cendres d'un monde injuste, voilà qu'elle s'effrite, squelette rouillé, tandis que les vivants cherchent encore ce qui est juste. Les penseurs jadis clamaient l'égalité pure, abolir les chaînes, renverser les trônes, mais les années ont gravé d'autre blessures : Des files sans fin, des libertés qu'on clone. Les nations converties portent leur fardeau, entre la nostalgie d'un pain partagé et le poids glacial des anciens barreaux, où l'espoir collectif s'est lentement noyé. Les jeunes redécouvrent ces manifestes ternis, cherchant dans les ruines une autre vérité, comme si l'Histoire pouvait, par magie, être ravie, effacer les goulags, les famines, l'adversité. Pourtant subsiste une question lancinante : Peut-on ressusciter ce qui mourut plusieurs fois ? Les fantômes du passé dansent, inquiétants, murmurant que toute promesse a son poids. Didier Guy

L'Écran bleu de l'Âme

  La sélénité s'éteint dans le reflet glacé, mon écran projette une lumière sans chaleur. Je scrolle l'ennui, les heures défilent, tracées par des pixels vides qui ignorent ma douleur. Le wifi pulse, artère numérique et froide, connecté partout, seul dans chaque instant. Les notifications sonnent dans un monde qui évide toute substance, tout contact vivant. Je cherche un visage derrière les avatars, une voix réelle sous les messages codés. Mais la modernité garde ses masques et ses phares, éclairant des routes où personne n'est allé. Mon spleen se télécharge, lent, automatique, application de tristesse en mode silencieux. Je fixe l'écran bleu, surface métallique, miroir d'une âme qui cherche d'autres cieux. Didier Guy

Les Chaînes Dorées

  L'or coule, lourd, dans les veines des villes, un sang froid qui achète et qui corrompt. Les mains se serrent, les bouches sont dociles, l'acier des lois se change en or qui rompt. On nous parle d'un pacte, d'un destin partagé, mais le contrat n'est qu'un leurre habile. Les tours se dressent, les dos sont courbés, et la liberté n'est plus qu'un mot inutile. Regardez-les, ces rois sans couronne, qui règnent par le chiffre et le silence. Leur empire est d'encre, leur loi se donne en billets froissés, en fausse abondance. Je sens le poids, invisible mais réel, d'un collier d'or qui n'a jamais brillé. On m'a vendu l'espoir comme un bien matériel, et j'ai marché, sans voir que j'étais enchaîné. Didier Guy

Trois arrêts vers toi

  Le ticket froissé garde ton parfum, trois stations seulement, un instant bref, mais dans ce rectangle de papier commun se cache l'origine d'un amour vif. Rouge comme le sang qui bat trop fort, rouge comme le soir où tu m'as souri, ce trajet banal devient un trésor, une preuve tangible que tout a surgi. Je le déplie encore, cherchant ta trace, ces chiffres, ces codes, cette date inscrite, témoins silencieux de notre première chasse vers un destin que rien n'avait prédit. L'ordinaire transfiguré par un regard, le quotidien devient légendaire, dans ma poche, ce bout de hasard transforme le métro en sanctuaire. Didier Guy

Quais de brume et l'absence

  Les bancs gardent la trace des corps fatigués, le bois garde mémoire des attentes immobiles. Autrefois, on comptait les wagons alignés, chaque retard creusait des heures difficiles. Le charbon dessinait des ombres sur les murs, le jambon-beurre tenait lieu de réconfort. On scrutait l'horizon, le cœur plein d'aventure, guettant celui qui reviendrait du nord. Les haut-parleurs crachaient des mots déformés, personne ne comprenait, mais tous écoutaient. Les adieux s'accrochaient aux promesses données, "À bientôt" résonnait comme un serment. Aujourd'hui, les voyageurs filent droit devant, pressés, les yeux rivés sur leurs écrans lumineux. Plus personne ne cherche un visage dans le vent, plus personne n'attend l'amour ou l'adieu. Les gares sont devenues des couloirs sans âme, où le temps se mesure en secondes volées. Qui se souvient encore de ces longues trames, quand attendre quelqu'un était une vérité. Didier Guy

La Pierre Qui Pleure

  Mes larmes creusent des canyons, sculptent la pierre sans bruit ni pardon. La diaphanéité grise d'une roche qui attend, translucide comme un cœur transparent. Je suis bloc figé dans le temps, masse inerte aux émotions pesantes. Chaque goutte grave son sillon, érode ma force, mon abandon. Le sel se cristallise en surface, dessine des veines, des traces tenaces. Combien d'années pour fendre la pierre ? Combien de sanglots pour qu'elle se perde ? Je demeure, minéral solitaire, attendant qu'un regard me libère. Mais seul le silence répond encore, dans ce canyon ou je dors. Didier Guy

Le Goût du Presque

  J'ai appris à rire quand le cœur se fend, à trouver dans l'amertume un parfum sucré. L'espoir s'accroche encore, têtu, battant, comme un fruit trop mûr qu'on refuse d'abandonner. Il y a cette douceur dans ce qui blesse, un sourire en coin face aux jours contraires. Je cultive l'ironie avec tendresse, comme on garde un secret qu'on ne veut pas taire. Le rose des illusions colore mes nuits, teinte fragile sur un monde en grisaille. Je savoure chaque instant de ce qui fuit, chaque promesse brisée, chaque bataille. Car résister, c'est aussi accepter que la vie se joue entre rire et sanglot, que l'on peut, d'un même souffle, célébrer ce qui nous déchire et ce qui nous rend beau. Didier Guy

Le Coureur et l'Ombre

  Le vent porte la foulée ardente, un souffle vif sur les pavés neufs. L'élan triomphe. Pourtant, sous l'horizon, une ombre patiente dessine, du doigt, les sentiers autrefois rêvés. Je cours vers l'aube, muscles bandés, chaque foulée arrache un cri au bitume. La victoire brille, ses promesses salées m'aveuglent, j'oublie que tout se consume. Mais derrière, elle attend, silhouette fidèle, cette part de moi qui traîne les pieds. Elle connaît les routes que je n'ai plus qu'elle, les rêves perdus dans ma course effrénée. Faut-il ralentir pour l'entendre ? Ou fuir jusqu'à ce que mon corps plie ? Entre l'homme qui fonce et celui qui veut comprendre, le crépuscule seul tranche, sans répit. Didier Guy

Quand la chimère s'attarde

  Elle partit sans bruit, le matin se voila, les draps gardaient encore la chaleur de sa peau. J'ai refermé la porte, mais elle ne claqua, le silence s'installa comme un poids trop lourd, trop tôt. Son parfum flottait, accroché aux rideaux, trois saisons durant, je l'ai respiré chaque jour. Automne, hiver, printemps, ce fantôme si beau, cette illusion beige qui masquait mon amour. Chimère têtue, tu refuses de partir, tu colles à mes vêtements, à mes nuits blanches. Je t'ai cherchée partout, voulant te retenir, mais tu n'es qu'un souvenir, une absence qui penche. Le regret a ce goût, amer et doux à la fois, comme un fruit qu'on n'a jamais osé mordre. Elle est ailleurs maintenant, sous d'autres toits, et moi je reste là, prisonnier de ce désordre. Didier Guy

Les Racines de l'Aube

  Je respire l'écorce, le vent des cimes, un souffle lourd de terre et de rosée. Mes poumons sont des bois, des chênes immenses, où chaque inspiration creuse un sentier. La mousse y croît, lente et tenace, sur les parois usées par l'hiver. Je crache des feuilles, des branches basses, et le monde en moi se met à reverdir. Aucun médecin ne comprend cette sève, ce vert qui monte, qui brûle sans flamme. Je suis l'arbre et la forêt, je me lève quand la nuit se déchire sous mes branches. Didier Guy

Nuit Persistante

  Un souffle chaud traîne entre les draps défaits, reste d'un feu qui brûle encore sous la cendre. L'odeur de ta peau, ce musc qui jamais ne s'efface, colle à mes doigts, à ma bouche avide. Je revois l'ombre de tes hanches, lente danse où le temps perdait son nom, tes doigts qui creusaient des sillons dans mon dos, comme pour y graver l'urgence d'un corps qui se souvient. La chambre garde en elle le rire étouffé, le craquement du lit, ces silences lourds où tout se disait sans un mot, sans un son. Seuls nos souffles en désordre, nos peaux qui s'appelaient, nos bouches qui mentaient en promettant l'impossible. Et maintenant, l'absence est un poids, un fruit mûr qui éclate entre mes mains. Je cherche en vain la trace de tes lèvres, le goût du sel, la marque de tes dents, tout ce qui fut et qui n'est plus, sauf dans ce parfum qui me hante, ce parfum qui ment, qui dit "Reviens" Didier Guy

Symphonie des Horizons

  Le sitar pleure en Inde un râga doré, tandis qu'à Cuba, le conga s'envole, le violon tzigane enflamme les nuits d'été, et le djembé bat la terre qui s'émerveille. À Rio, la samba danse sous les palmiers, les kora d'Afrique chantent l'espoir, les flûtes andines caressent les sommets, et le oud chuchote des secrets au crépuscule. Que le monde entier s'accorde en un seul chant, où chaque note est un pont, chaque rythme un élan, car la musique, joyau sans frontière, fait vibrer nos cœur en une même lumière ! Didier Guy

Symphonie de Glace

  Dans le silence, ta voix résonne plus fort, chaque battement du cœur compte tes pas. Je cherche ta chaleur dans le décor d'une maison qui ne te reconnaît pas. L'air que tu respirais garde ta forme, les objets portent l'empreinte de tes mains. Ton absence n'est pas un vide, elle transforme chaque seconde en un voyage incertain. Je brûle de ce froid qui te ressemble, cette blancheur aveuglante me consume. ta présence manquée devient l'ensemble de tout ce que je suis, de tout ce que j'assume. Les notes que tu laissas derrière toi composent une mélodie sans partition, une harmonie glacée qui m'impose sa loi, Un concert silencieux, pure contradiction Didier Guy

La stridence pourpre sous la langue

  Le matin traverse mon crâne d'acier, sous la lumière, chaque bruit s'aiguise. Une saveur âpre danse sur mes lèvres, rouge opaque, mordant, sans apaisement. J'avale ce silence brûlé, étrange alliage, le goût métallique colle au palais. La vérité s'impose, indomptable, sur ma peau, un pincement vermeil. L'air vibre entre mes doigts contractés, mes sens exaspérés, tendus vers la faille. Je regarde la pièce, tout est trop net, le monde s'essouffle sur mes nerfs effilés. Avant l'aube, j'étais tout proche du calme, maintenant, la couleur hurle, et le silence, ce métal précieux, me laisse seul dans son éclat insoutenable. Didier Guy